vendredi 5 novembre 2010

Décadence




decadence



Décadence

Sable d'automne

Et cher hiver
Ton froid me gagne
A temps couvert
J'ivre la mort
En alcool de synthèse
Et pluche des porcs
Pour en faire des prothèses
Sable d'automne
Et chairs diverses
Le roi du bagne
A découvert
Le livre des morts
Au rôle d'athèse
Par le fer crucifié
Des plus chers athés
Par le sang incongru
Du prince des singes nus
Par l'abîme de sarcasmes
Qui s'ouvrent sous la béance
De ton sexe mort
Madame la décadence
Tu n'as plus rien à dire
Ta vie a mis les voiles
Pour un pays lointain
Perdu au sein d'étoiles
Qui voguent à lame
Au grés des vagues
De l'océan pédant
Le vieil océan du temps
Le vieil océan dégoûtant
Rempli de poisons et de raisons
Et d'oraisons faites céans
Tant par la mer et par la chair
Que par les restes de la femme-livre
Qui opère la synthèse des morts
En alcool de givre
En alcool de neige
En alcool ivre
La femme malade qui ne sait pas
Que dans son ventre palpite une aube
La femme démente qui ne croit pas
Que dans son sein s'agite un rat
La femme fidèle qui ne sent pas
L'erreur fatale qui la gouverne
La femme putain reine de son corps
Qui distribue son sexe aux porcs

Mais...quel est le port où s'embarquent tous les désirs flétris, les envies ratées, les plaisirs avortés, tous les déchets de l'âme qui rampent pitoyablement dans les corridors du silence ? Où vont-ils tous ces soupirs impuissants, ces regrets, ces ambitions déçues, ces amours déchus ? Où sont donc les larmes de sang de mon coeur éclaté ? Où te caches-tu, toi dont la frêle tête blonde protège douloureusement de si tendres mystères, je te cherche, mais j'erre en vain dans le désert, connais-tu une porte où je puisse frapper et que l'on m'ouvrira sans rien me demander en échange, me laisseras-tu entrer chez toi pour réchauffer les cendres endormies de ton âme de verre ? Où puis-je diriger mes pas sans risquer la chute à chaque seconde, mais après tout, peut-être est-ce important de ne pas savoir, de ne jamais savoir jusqu'où peut aller cette intolérable décadence...

(M.Tardieu, 1975)


2 commentaires :

Lilou a dit…

" mais aprés tout, peut être est ce important de ne pas savoir.."

Ne pas savoir,n'est ce pas risquer de découvrir ?

Dé cadence..
quand les dés ( synchronicité..) marchent en cadence ( organisés)
il est normal que les choses n'aillent pas de soi..

Chronophonix a dit…

Il va de soi qu'en 1975, pour moi les choses n'allaient pas de soi...