mardi 26 juin 2018

Soufisme : Fanâ' et Baqâ'






Baqâ’ (« existence », « subsistance ») est un terme soufi du vocabulaire de l’islam.
L'expérience du fanâ’ (arabe :فَناء [fanā'], littéralement anéantissement ; évanouissement) est généralement suivi par celle du baqâ’ (« existence », « subsistance ») qui permet au disciple d’intégrer son état d'éveil tout en l’harmonisant avec les contingences spatio-temporelles, les affaires du « bas-monde ».(wikipedia)


Le texte qui suit est emprunté à un article du Blog Saveur de Vivance





S’éteindre à notre illusion pour vivre dans le Réel

Tout l’édifice de la métaphysique de l’Être avec ses conséquences (relativité ou illusion du monde, recours nécessaire à la via negativa et au dépassement des oppositions…) n’a de sens que s’il s’ancre dans l’expérience du fanâ’, extinction du « moi » contingent dans le « Soi » divin, annihilation de la conscience humaine individuelle dans la Présence totalisante de Dieu.
Cette expérience est axiale dans le soufisme mais aussi, plus généralement, en islam, puisqu’elle porte l’attestation de l’Unicité (tawhîd) à son degré ultime, et en extrait la quintessence. Les oulémas les plus exotéristes ont donc agréé le fanâ’, en tant que réalisation de la servitude ontologique (islâm).

Les soufis postulent que la seule solution pour connaître Dieu est de s’anéantir dans Son unicité ; de la sorte, l’homme réalise par une expérience tangible que son être et celui du monde n’ont pas de teneur objective : la conscience trompeuse d’être un sujet autonome est pulvérisée, la dualité du sujet/objet est dépassée puisque le sujet s’est volatilisé.
En termes mystiques, l’amant est devenu l’Aimé, le contemplant le Contemplé. Le fanâ’ est vécu comme une libération des souffrances qu’impliquent les limitations de l’ego. Il n’y a pas d’autre issue au labyrinthe de la conscience individuelle conditionnée, en effet, que de détruire celle-ci.
Cette immersion dans « l’océan de l’Unicité » s’accompagne d’une ivresse (sukr) sans pareille.
Sur le plan cognitif, elle correspond à la « conscience unitive » (jam‘). Celle-ci fait suite à l’état ordinaire, profane, de la « conscience séparative » (farq) qui oppose le Réel au monde phénoménal. Par le jam‘, l’individu rassemble toutes les choses qui constituent le monde pour les ramener à leur indifférenciation originelle. Il est tellement dominé par la vision de Dieu qu’il ne perçoit aucune séparation entre les choses et lui .




Cependant, l’extinction unifiante en Dieu n’est pas considérée comme l’acmé de la réalisation spirituelle.
Elle n’est que le prélude à une expérience plus accomplie, celle du baqâ’ : l’initié, ayant consumé ses attributs individuels, « subsiste » désormais en et par Dieu, ce sont les Attributs divins qui agissent en lui.
Selon un hadîth qudsî fréquemment cité par les soufis, Dieu est devenu « l’ouïe par laquelle il entend, la vue par laquelle il regarde, la main avec laquelle il saisit et le pied avec lequel il marche ».
Dans la première phase, celle du fanâ’, l’homme ne voyait rien en dehors de Dieu ; dans la seconde, celle du baqâ’, il Le voit en tout.
A l’ivresse de l’immersion en Dieu succède la sobriété qui permet à l’initié d’être à la fois avec Dieu et avec le monde. Laissant Dieu disposer de lui comme Il veut, il réalise sa servitude ontologique (‘ubûdiyya) en même temps qu’il se met au service des hommes.

Cette double expérience du fanâ’/baqâ’ est si essentielle dans le soufisme que Junayd considère qu’elle le définit à elle seule. « Le tasawwuf, dit-il, se résume en ce que le Réel te fasse mourir à toi-même, et te fasse revivre par Lui . » Ce thème est la transposition sur un plan mystique du verset coranique : « Tout ce qui se trouve sur terre est évanescent (fanin). Seule subsiste (yabqâ) la face de ton Seigneur, pleine de majesté et de munificence » (Cor. 55 : 26-27) .
Au degré du baqâ’, « le mental, dont l’activité s’était complètement arrêtée au stade précédent, reprend sa fonction cognitive normale, et le monde phénoménal réapparaît lui aussi. Le monde se déploie à nouveau aux yeux de l’homme sous la forme des vagues déferlantes de la multiplicité.
Les choses qui avaient été ‘‘réunies’’ dans l’unité se séparent à nouveau les unes des autres en autant d’entités différentes. C’est pourquoi on appelle cette étape celle de la ‘‘séparation après l’unification’’ ou la ‘‘seconde séparation’’ ».

Dès lors,"l’initié" perçoit simultanément l’Unité dans la multiplicité et la multiplicité dans l’Unité sans que l’une ne voile l’autre. C’est ce que Ibn ‘Arabî appelle jam‘ al-jam‘ : les choses phénoménales qui avaient toutes été précédemment réduites à l’unité absolue dans le fanâ’, c’est-à-dire dans la première conscience unitive, sont à nouveau séparées pour être encore « rassemblées » dans cette nouvelle vision de l’unité. Présent à toute chose, par Dieu et non par lui-même, l’initié « reconnaît son droit à chacune des deux présences [humaine et divine], et établit une balance dans sa vision des choses ». Il donne à chaque niveau de réalité la considération qu’il mérite.




Un tel être est appelé en soufisme « celui qui possède les deux yeux » (dhû l-‘aynayn), en référence au Coran : « Ne lui [l’homme] avons-Nous pas donné deux yeux […] Ne lui avons-Nous pas montré les deux voies ? » (Cor. 90 : 8, 10). La plupart des hommes ont une vision borgne du monde : ils ne voient que le monde manifesté, et tout le reste leur est voilé ; il en va de même, bien sûr, pour les scientifiques positivistes. Les théologiens exotéristes et le commun des croyants ne voient à leur tour que d’un œil, car ils considèrent Dieu comme transcendant ou immanent, alors qu’Il est les deux à la fois. L’astrophysicien Hubert Reeves tient des propos d’une similitude saisissante : « Nous ne pouvons pas vivre une seule démarche, à peine de devenir fous ou de nous dessécher complètement. Il nous faut apprendre à vivre maintenant en pratiquant à la fois la science et la poésie, il nous faut apprendre à garder les deux yeux ouverts en même temps ».

Même chez les initiés, la vision des « deux yeux » n’est pas assurée. Ceux qui sont plongés dans le fanâ’ voient que « tout est Lui » et donc ils ne voient que l’Unité. Seul « celui qui a les deux yeux », qui est dans le baqâ’, a une vision plénière de la Réalité. « De son œil droit il voit l’Unité : la Réalité absolue et rien d’autre que l’Unité ; et de son œil gauche il voit la multiplicité : le monde phénoménal. Mais le plus important, dans le cas de cet homme, c’est qu’en plus de sa vision simultanée de l’Unité et de la multiplicité, il sait que celles-ci sont, en dernière analyse, une seule et même chose » : c’est le jam‘ al-jam‘.



Images : la Grande Mosquée de Lahore, Pakistan (2004)



samedi 23 juin 2018

Deux Maîtres, une même Idée...




Deux contextes différents, mais une idée commune à la base de ces deux textes, qui ensuite continuent chacun dans leur propre direction.





"Avant la publication, l’auteur a un droit incontestable et illimité. Mais dès que l’oeuvre est publiée, l’auteur n’en est plus le maître. C’est alors l’autre personnage qui s’en empare. Appelez-le du nom que vous voudrez : esprit humain, domaine public, société. C’est ce personnage-là qui dit : “je suis là, je prends cette oeuvre, j’en fais ce que je crois devoir en faire, moi, esprit humain ; Je la possède, elle est à moi désormais”.
Victor Hugo






"(...)Qu'y a-t-il là, à voir objectivement? Tant que vous gardiez votre manuscrit par devers vous, il vous appartenait. Maintenant que le livre a été publié, il appartient à tout le monde. Chacun va exprimer son opinion, pour ou contre, suivant ce qu'il aime ou ce qu'il n'aime pas. Vous devez observer et noter l'intensité avec laquelle ces opinions pour ou contre s'expriment, ce qui vous permettra de voir la vérité qui se cache derrière de virulentes critiques. Ainsi vous comprendrez la vrai nature de la société et la manière dont les gens sentent et pensent..."
Swami Prajnanpad (lettre à Sumangal Prakash)


 
Quelques partages sur ce même sujet:

Ariaga

J'adhère, nos textes quand nous les offrons ne nous appartiennent plus. je reçois des mails me disant que je mon blog est pillé. Peu m'importe, revendiquer à ce sujet serait comme demander que l'on me rende mon souffle quand j'ai expiré.

 
Lise

Il en est ainsi de toute parole..
Une fois émise elle ne nous appartient plus..
D'ailleurs était elle vraiment notre dans le brouillard de nos idées?
La laisser sortir c'est prendre le risque de découvrir "tout le reste".


 
Mutti

J'aime l'idée du "droit incontestable et illimité" de libérer les pensées, les idées qui jaillissent de nos têtes pensantes... quant à s'en faire "propriétaire", seul l'ego en est capable...

J'aime l'idée du partage, une simple offrande en vérité pourtant chargée d'une plus que certaine "responsabilité"... d'où l'apprentissage de discerner ce qui peut, sans trop de dommages être ainsi, dans le monde, libéré...




vendredi 15 juin 2018

mardi 12 juin 2018

Vivre en Présence n°42 : Cheikh Khaled Bentounes - Hommage à Arnaud Desjardins









Extraits de la page Facebook «Vivre en Présence»





« J’étais encore enfant lorsque Arnaud Desjardins et Denise sa première femme, vinrent à Mostaganem en 1961. Dans le contexte de la guerre d’Algérie, nous étions très étonnés de voir deux Européens venir à la zâwiya située dans le quartier de Tijdit, réputé dangereux.
Accueillis par mon père, le cheikh el-Mehdî, nous n’avions approché Arnaud et Denise qu’à la fin du cours coranique et je n’en garde qu’un souvenir fugitif. C’est bien plus tard, en 1970, quand je vivais à la zâwiya d’Ivry, que je revis Arnaud, Salle Pleyel, lors de ses conférences et de la projection de ses très beaux films sur les traditions spirituelles orientales.
En 1990, à l’Assemblée Générale des amis de Fond d’Isère, nous nous sommes revus. Ce fut un grand bonheur et l’intimité partagée en toute simplicité la veille de l’Assemblée restera présente dans mon coeur. J’ai senti que le respect qu’il me témoignait s’adressait plus à la tradition que je représentais qu’à ma propre personne.
Cette attitude m’a permis de mesurer la sagesse et l’expérience de cet homme. Le fait qu’il accepte l’autre et le situe sur le même plan – alors que nous sommes de niveau et d’âges différents – témoigne d’une remarquable maîtrise de soi et de la maturité de sa réalisation spirituelle.
Lors de ma venue à Hauteville en 1996, j’ai découvert un lieu ouvert sur le monde et les autres traditions. La qualité du silence qui y règne est propice à la transmission d’un enseignement spirituel vrai, simple et sobre. Je souhaite qu’un havre de paix comme celui-ci perdure et que l’esprit qui l’anime demeure à jamais. »
Cheikh Bentounes
Extrait de la revue «Questions De», n° 111 (Édition Albin Michel)







«Être en Présence, c'est être en intimité avec soi-même et le partager ensemble, c'est savoir se relier dans l'instant avec ce qui nous habite en profondeur, c'est savoir écouter à partir de cette même profondeur, c'est être là, tranquille, disponible, attentif, vulnérable.
Vivre en Présence, c'est actualiser tout cela, ici et maintenant, instant après instant.»








After-Chèvre



Avertissement : les images n'ont rien à voir avec les textes, ce qui explique le titre générique de l'article.




1
Tiens voilà le Bon Dieu qui rapplique à la hâte
Délicieux compagnon ami de longue date
Il vient pour nous offrir l’habile sérénade
Des angélus moqueurs aux carillons agiles
Et nous souffler son verbe conjugaison subtile
Voix du ciel qui résonne et ordonne adéquate
D’illuminer nos coeurs et ouvrir délicate
La danse de nos amours à jamais immédiate
(1994)




2
─ Grand-Père, c’est quoi, tous ces mots ?
─ Quels mots ?
─ Ces mots de bonheur, d’espoir, d’envie, de compassion, de passion dépassant la passivité du passant pour accéder enfin à l’attention du patient...
─ Halte, misérable, ces mots ne font que bavarder entre eux ; où se cache donc le sens, où se cache-t-il, en admettant qu’il y en ait un, ou plusieurs ? Car pas du tout ne conviendrait guère à ce jeu de l’Où...
─ Du sens des mots proviennent tous les maux !
─ Ce n’est guère motivant
─ Le motif n’est pas à propos
─ Ni la démo de ces mots-là
─ Autorisés ?
─ Motorisés !
(1994)






lundi 11 juin 2018

Claude Debussy : Children's corner







Les 6 pièces pour piano de Claude Debussy regroupées sous l'appellation «Children's corner» ont inspiré dans les années 80 un spectacle destiné au jeune public, spectacle pour lequel il m'avait été demandé de créer un arrangement de ces pièces pour ensemble de synthétiseurs. Je me suis associé à l'époque avec un autre pianiste, Daniel Pinès, qui a réalisé les pièces 1, 5 et 6, ayant pour ma part réalisé les 2, 3 et 4. Voici le résultat, cet enregistrement étant totalement inédit.




Claude Debussy avec sa fille


Voici la version originale, brillamment interprétée au piano par Arturo Benedetti Michelangeli




Claude Debussy




Albert Marcoeur : «Elle était belle...»








Albert Marcoeur est un musicien et chanteur français inclassable, né le 12 décembre 1947, à Dijon. Il commence sa carrière au début des années 1970. Féru d'expérimentations mélodiques, rythmiques et sonores, il n'en est pas moins un auteur de textes à la fois légers, drolatiques et décalés. Ses côtés expérimentateur, musicien éprouvé et amuseur lui valurent un temps l'appellation de "Frank Zappa français" (suite sur Wikipedia).

Aller sur le site d'
Albert Marcoeur.


Extrait de son deuxième album ("Album à colorier", enregistré en 1975), un titre que j'aime particulièrement pour sa musique, mais aussi pour ce qu'il m'évoque (j'ai animé les bals populaires pendant pas mal d'années!), alors voici : "Elle était belle". Et en bonus, l'histoire du Père Grimoine...







vendredi 8 juin 2018

Lumière Lunaire




Lunaria (Monnaie du Pape, Lunaire, Herbe aux écus, médaille-de-Judas, satin blanc).


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lundi 4 juin 2018

Du Temps et des Roses




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samedi 2 juin 2018

L'Humour du Prochain n°44 : Chris Bennett






Extraits de la page Facebook «L'Humour du Prochain», qui, comme son nom l'indique, est consacrée au partage d'humour sous toutes ses formes et déclinaisons.