mercredi 10 août 2011

Ensemble Al Kindi - Sheikh Habboush






Présentation, par Abdelwahab Meddeb, professeur de littérature comparée, écrivain et poète, fondateur de la revue littéraire Dédale.

C’est la voix qui ravive la lettre

"Et cette voix qui nous vient d’Alep nous rappelle que le poème a pour origine et raison d’être le chant.


La voix sort du tréfonds et se répand dans le monde, se répercute sur les obstacles, les traverse et monte très haut, jusqu’aux cieux.


L’idée de l’élévation ne quitte pas cette voix.


La voix provient du fond de la caverne, elle s’échappe de la prison du corps. Les lettres qu’elle module émanent de l’espace du dedans, où, dans les ténèbres, palpitent et travaillent les organes. Du son le plus guttural au son le plus labial, le souffle traverse l’intégralité de l’appareil vocal. Et chez les soufis un mot symbolise cette traversée de l’itinéraire le plus ample à l’intérieur du corps, c’est le mot Hawa, qui est composé de deux lettres: Ha est le plus profond, il provient du plus bas de la glotte; et le Waw est le plus extérieur, porté par le bout des lèvres. Huwa, c’est la troisième personne, Lui, qui désigne Dieu.
La troisième personne pour dire la gloire de l’ambivalence divine, entre l’absence et la présence, l’apparent et le caché, le visible et l’invisible, l’évidence et le mystère.

Ici, la célébration de la lettre, comme signe éminent, dans l’indétermination du sens, dans la densité de son indécidable, se réalise à travers la voix.

Et cette voix qui nous vient d’Alep est une grâce. Celui qui en jouit l’exerce d’une manière innée, selon une technique ancestrale, transmise par les hommes qui entretiennent le génie du site. J’ai presque le désir de dire que cette grâce qui s’accorde à l’héritage transmis excède toute forme de conscience. Car le don a pour lui de brouiller les frontières entre le juste et l’injuste.

Avec quelle joie l’oreille, le choeur et l’esprit reçoivent cette voix qui émane de ce qui reste d’une tradition populaire ayant pu se mouvoir jusqu’à nous satisfaire par sa capacité naturelle de se nourrir de l’autre tradition savante qui lui est parallèle.

J’ai écouté cette voix et le choeur qui l’accompagne à Alep même dans un salon mamelouk au décor aussi profus que celui que recèle une zawiya qui regorge d’ex-voto, offrande de riches et affiliés. Et le qânoun aux cordes pincées par les doigts de Julien Jalal Eddine Weiss enveloppe de ses ondes le flux et le reflux de la voix. Un répertoire s’est développé devant nous où le connaisseur reconnaît les éclats des haltes et des demeures qui scandent les étapes que l’initié parcourt sur la Voie. A votre tour de les découvrir et d’y élire séjour".





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2 commentaires :

Nout a dit…

Et le chant a pour origine le coeur de l'être...magnifique!

Anonyme a dit…

Bonjour, un simple message pour vous signaler le concert de l'Ensemble Al Kindi à Paris les 11 et 12 Décembre au Cabaret Sauvage.
Bien à vous,
Simon