dimanche 16 février 2014

Amma : «De l'or pur»







Voici extrait du numéro 64 de la revue Nouvelles Clés (hiver 2009/2010), un entretien avec Amma.


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«En plein bouclage de ce numéro de Clés, nous sommes avertis de la présence d'Amma à Toulon et on nous propose de l'interviewer. Diminutif de Sri Mata Amritanandamayi Devi, Amma a donné le darshan (bénédiction par étreinte) à 27 millions de personnes. Pourquoi ne pas rencontrer pareille personnalité ? Nous déboulons dans le Zénith Oméga de Toulon, où règne une atmosphère de kermesse bon enfant, à la fois hindoue et occidentale, un mélange improbable et plaisant. Entrée libre. Des milliers de personnes, de tous âges et conditions, attendent par rangées, avec calme, de recevoir sa bénédiction. Tout est très bien organisé, avec souplesse et sourire chaleureux. On nous conduit à ses côtés et, en attendant que l'on traduise nos questions dans sa langue, le malayalam, nous assistons, médusés, à l'incroyable défilé d'être humains que cette matrone joviale, irradiant d'une énergie littéralement palpable, embrasse avec un élan attentif à chaque fois renouvelé, une compassion parfaitement ajustée à chaque personne.»

Nouvelles Clés : Dans la crise globale que nous traversons, quelles sont les chances de l'humanité de s'en sortir ?

Amma : Le problème fondamental est le manque de prise de conscience de l'humanité. Cela peut certaine­ment être dépassé par un authentique esprit de solidarité, des discussions appropriées et du travail sur soi.
Bien que nous ayons une conscience, nous menons des vies inconscientes : or, s'il est difficile de réveiller une personne endormie, il est encore plus difficile de réveiller une personne qui fait semblant d'être endormie mais ne l'est pas. Il faut donc nous secouer, assumer notre éveil, voir la situation, nous unir, mener des initiatives utiles, c'est-à-dire pas seulement intellectuelles, mais avec le coeur. Et cela fera certainement évoluer la situation. La « crise globale » dont il est question est une chute dans un trou très étroit : nous pouvons donc nous appuyer aux parois, escalader et facilement remonter. Et ainsi sauver l'humanité tout en sauvant nos âmes.


Comment agir individuellement pour l'intérêt collectif ?


L'individu est le fondement, la plus petite unité humaine à partir de laquelle se crée la famille, qui s'agglomère en communautés, qui constituent des nations, dont l'humanité entière est faite. Tout part de l'individu, y compris la paix et la guerre : c'est le conflit intérieur à l'esprit individuel qui se manifeste extérieurement sous forme de violence. Cela dit, il est important que nous ayons une connaissance plus profonde du monde subjectif et du monde objectif. Les individus ne sont pas comme des îles isolées. Nous faisons partie du change­ment universel. Mais le changement part de l'individu, sinon, rien ne se passe. Une fois que nous changeons, les autres changent aussi, automatiquement. Partout de par le monde, les humains imitent les autres. Par exemple, les hommes français furent les premiers à porter cette petite barbe qu'en Inde on appelle bulgan (Amma rit en faisant le tour de sa bouche avec la main, mimant une barbe de mousquetaire). Aujourd'hui, on trouve de ces barbes partout. J'aurais pu aussi bien parler de vêtements, de chaussures, de la manière de se nourrir ou de se divertir. Les gens imitent ceux qui les inspirent. Nous avons donc besoin de bons « rôles modèles », qui inspireront toute l'humanité.
Je ne dis pas que le monde entier puisse changer. Ce serait comme vouloir vider l'océan ! Toutefois, même si cela revient à prélever une petite cuillerée d'eau dans l'océan, chaque effort individuel contribue à un changement global possible. Nous ne pouvons pas changer les plis du monde, mais si nous nous remettons sans cesse à l'ouvrage, nous deviendrons bons et, par imitation, les autres le deviendront aussi. Comment ? Fondamentalement, par amour. Nous avons besoin d'amour, c'est-à-dire que nous avons besoin d'aimer, d'aimer les autres. Quand l'amour compassionnel se lève, tout se réalise. Avoir de la compassion signifie connaître la situation de l'autre personne. Tout part de l'amour. Voilà ce dont nous avons besoin.


Comment élever notre conscience ?

Nul besoin d'élever la conscience. La cons­cience est. C'est la vraie réalité, le point le plus élevé. Toutefois, parlant de la situation indivi­duelle, ce n'est que par la connaissance authentique que nous pouvons y accéder. Prenez le feu. Vous savez qu'il vous brûlera si vous y mettez la main. La connaissance vous incite donc à éviter le feu. Si vous voyez une fine couche de glace sur un lac, vous évitez également de marcher dessus, parce que la connaissance vous apprend que vous tomberiez à l'eau. Voilà comment vous éveiller à la cons­cience : par la connaissance de vous-même et des autres.


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