dimanche 29 mars 2015

Isabelle Padovani : La voie du couple











«Maintenant je m'aime et je sais m'occuper de mon jardin, et je ne permettrai pas que la personne qui arrive en face de moi m'aime moins que je m'aime et ne s'occupe pas aussi bien de mon jardin que je m'en occupe.» (Isabelle Padovani)




«La demande d'être heureux grâce à un autre est naturelle, normale, légitime chez un homme ou une femme qui n'a pas encore atteint le bout du chemin et qui se sent encore incomplet» 
(Arnaud Desjardins, Pour une vie réussie)






samedi 28 mars 2015

Philémon, par Fred : Trois petits tours




Fred, Philémon, l'âne Anatole, le "A", etc.., ça doit bien vous rappeler quelque chose...Alors replongeons nous avec joie dans les délices de notre jeunesse qui fut si pleine de merveilles oubliées, comme cette BD!

Fred 01

Fred 02

Fred 03

Fred 04

Fred 05

Fred 06

Fred 07

Fred 08



jeudi 26 mars 2015

L'Art d'Être Conscient n°18 : Paroles de l'Être








Extraits de la page Facebook «L'Art d'Être Conscient»





«Quand vous marchez, marchez. Quand vous priez, priez. Quand vous regardez, regardez. Quand vos mangez, mangez.
Le secret de la vie est de la vivre, tout simplement. Le moment présent est infiniment riche.
L'attention est la clef pour le vivre dans sa profondeur. Cette profondeur ne se situe pas dans quelque domaine ésotérique, mais au cœur du quotidien, précisément comme quotidien.»
(Un Chartreux)




«Ne soyez pas la victime des situations, soyez le disciple des situations» (Yvan Amar)

L'exemple de la vaisselle.

Juste ici et maintenant, je fais la vaisselle; est-ce un choix ? Répondre à cette question ne m'est pas utile puisque je la fais, cette vaisselle, donc qu'importe à présent l'idée d'un choix préalable, qui n'est qu'une pensée bien superflue.

Suis-je victime de cette situation ? Oui si je résiste, si je râle, si je n'ai pas envie de la faire, si je pense que d'autres activités plus gratifiantes seraient bien mieux pour moi, etc... mais que je la fais malgré tout, cette vaisselle, à reculons, du bout des doigts et de l'extrémité du coeur...

Suis-je disciple de la situation ? Oui si je fais la vaisselle, point final. C'est alors que je pourrai apprécier l'eau chaude sur mes mains, les assiettes et les verres propres qui reluisent, les couverts qui tintent, je pourrai ressentir que cette humble tâche est tout aussi importante que n'importe quelle autre, bref, je vais pouvoir profiter de ce moment de vie au lieu de le subir.











mercredi 25 mars 2015

Jany Verducci : Penche-Toi






Voici «Penche-Toi», un chant dévotionnel de Jany Verducci; si j'écris chant, et non chanson, c'est que nous n'avons ici ni couplet, ni refrain, ni mesure, et le rythme est très étiré, purement intérieur, j'ai toujours fait en sorte de préserver sa respiration naturelle et de ne pas chercher à imposer un canevas mesuré. Ce qui demeure mystérieux pour moi est que Jany arrive à chanter ses chants sur ses playbacks sans se perdre en route, vu l'absence de tout repère rythmique; il reste alors le "feeling", et pourquoi pas, la Grâce...







Peintures par Arcabas


mardi 24 mars 2015

La transformation de la conscience, par Eckhart Tolle





Un condensé saisissant de l'enseignement d'Eckhart Tolle, un manuel de "Savoir-être", à savourer dans l'instant présent, bien évidemment...




La transformation de la conscience, par Eckhart TOLLE


Transcription de la Conférence de Hambourg, le 13 avril 2002.

«Explorons ensemble quelque uns des grands mystères de l’existence humaine. Ces choses auxquelles les adultes ne portent plus d’attention, et sur lesquelles ils ne posent plus de questions. Seuls les enfants le font encore.

Alors que nous sommes assis ici attentifs aux paroles, nous réalisons qu’il y a une autre dimension que celle des mots. Quelle est cette autre dimension ? On pourrait dire que c’est le simple espace de silence. Lorsque la parole émerge, vous entendez les mots et en même temps, une partie de votre attention se porte aussi sur les espaces silencieux, ou encore sur l’arrière plan silencieux. C’est très simple. Il s’agit seulement de remarquer qu’en dehors des mots, il y a une immobilité intérieure.

Et quelque chose d’étrange se produit quand vous percevez le silence, ce qui signifie prêter attention au silence. Une chose étrange vous traverse à ce moment là qui est : dans cet acte de perception du silence, l’activité mentale, c’est-à-dire le flot des pensées, cesse durant ce moment ou votre attention se porte sur le silence. Pour un moment le flot des pensées s’arrête, pendant que vous écoutez le silence. Cette écoute constitue l’accès à une nouvelle dimension de la conscience, à laquelle la plupart des gens ne sont pas attentifs. L’arrêt du flot des pensées devient possible sans aucune perte de conscience. Et durant ce moment de perception, d’écoute de cette dimension du silence, vous êtes entièrement présent dans ce moment, vous habitez entièrement ce moment, étant en lui totalement.

C’est la raison pour laquelle nous sommes ici, pour accéder à cette dimension intérieure, pour aller au delà du flot continu des pensées avec lesquelles la plupart des gens s’identifient complètement en tant qu’eux même : « moi, le moi ». Le soi est dans chaque pensée, sans distanciation et ceci constitue l’état d’absence. Mais ici nous entrons dans l’état de présence.

Autrement, vous êtes entièrement piégé par le conditionnement du mental, avec tous ses schémas, ses connaissances accumulées, ses expériences et son passé. Quand vous êtes totalement confondu avec cela, vous mimez le récit que vous vous faites dans le mental. Il n’y a aucune liberté en cela.

Donc la possibilité de vivre dans un état de conscience différent de celui dit normal, s’offre à vous. Donc vous aurez sûrement déjà remarqué qu’ici, pendant cette conférence, votre esprit, votre mental pensant n’est ni nourri, ni stimulé. Et si vous êtes assis ici, tout en étant encore complètement identifié au flot de vos pensées, vous ressentez déjà qu’une certaine agitation, une impatience, et un mécontentement est en train de vous envahir. Et votre mental pensant, de dire : « et de quoi parle t-il ? Je ne comprends rien ». En fait il ne dit pas grand-chose. Parce que le mental pensant et le sens du soi qui naît avec l’identification au mental conditionné, ce sens du soi entièrement fabriqué par le mental est toujours à la recherche du plus qu’il pourrait ajouter à lui même. Ainsi, il sera à la recherche de nouvelles idées à accumuler, de nouvelles croyances : maintenant je sais ce en quoi je crois ! Ou peut-être de nouvelles émotions qui deviendront des expériences.

Et donc il ne trouve pas satisfaction ici, car son mental pensant ne reçoit pas la nourriture qu’il désire, celle qu’il veut s’approprier pour se sentir un peu plus gros quand vous sortirez d’ici, avec la sensation d’avoir ajouté quelque chose à ce moi. Cela vient du fait que le sens du soi est fondé sur « moi », mon histoire et mon passé

Qu’est ce que vous vous demandez quand les gens vous demandent qui êtes-vous ? L’identité qu’ils vous donnent avec une grande conviction, « je suis John Smith », ne peut pas être mise en doute. Puis ils vous raconteront ce qu’ils font pour gagner leur vie. Et s’ils ont suffisamment de temps, ils vous raconteront une courte ou longue histoire. Et ceci est l’histoire de « moi ». Puis la personne vous parlera aussi des rôles qu’il ou elle joue dans le monde, convaincue de ce qu’il ou elle est : « je suis mère de trois enfants, je suis comptable, je suis au chômage, j’ai réussi dans la vie ». Sa petite identité conceptuelle, les idées qu’il ou elle a dans la tête

Bien sur nous avons tous un rôle à jouer dans la vie, mais de croire que nous sommes que cela, s’y être identifié, constitue une terrible prison, un esclavage. Vous pouvez remplir ce rôle sans croire que c’est ce que vous êtes. Vous pouvez remplir votre rôle de mère, sans que cette idée occupe entièrement votre esprit. Autrement, vous serez une mère pour le restant de vos jours et vos enfants resteront des enfants pour vous. Vous penserez avoir toujours raison et vous leur dicterez leur conduite. Vous serez emprisonné dans ce rôle. Le monde est rempli de gens piégés dans le rôle que la société leur a attribué, leurs rôles conditionnés, qui sont des structures mentales. Un rôle n’étant rien d’autre que certaine forme mentale. Des conceptions de l’esprit, des pensées. Donc c’est un autre aspect de l’identification au contenu du mental.

Et ce sens de l’identité personnelle « moi », qui est issu de l’identification au contenu du mental, n’est jamais à l’aise, ni accompli pendant bien longtemps. Pas pour longtemps. Ce moi vit dans un état de « pas assez ». Un autre sentiment accompagne cet état « je ne suis pas encore complet, je n’ai pas encore réussi, j’ai besoin d’être chez moi, j’ai besoin de plus de grandir dans le sentiment d’être moi-même ». Et chez beaucoup de gens, l’histoire du moi semble avoir été un accomplissement, même si ce n’est qu’en surface. Et notre culture nous dit souvent que les gens célèbres ont réussi, en apparence, et cela vous donne l’illusion de pouvoir parvenir à l’accomplissement du sens du soi, fondé sur une histoire. Ce serait la fin heureuse. Si vous rencontrez des célébrités ou des gens riches, vous vous rendrez compte qu’ils sont dans le même état d’esprit que n’importe qui. Ils n’ont pas l’impression d’être accomplis, ils ressentent la peur, un mécontentement et un sentiment de manque alors qu’ils ont tout. Ce que je vous dis ressemble à de mauvaises nouvelles, comme si vous n’aviez pas la moindre chance de réussir en cette vie ci.

Maintenant, s'il vous reste assez de temps, ce sens du soi aura l’impression qu’il vous reste suffisamment de temps pour vous réaliser, « j’ai encore 40 ou 50 ans devant moi », et c’est probablement suffisant pour compléter l’histoire de « moi ». Et faire en sorte qu’elle se termine bien. Donc on ne se rend pas compte que ce mécontentement, ce malheur, ce moi problématique qu’on connaît en direct, ne sont pas un problème personnel, mais une construction inhérente à la structure du mental. C’est un dysfonctionnement structurel et non un dysfonctionnement basé sur le contenu du mental.

Et chaque sens du moi, avec sa propre histoire, sait que cette histoire n’a pas tout à fait tourné de la manière dont elle aurait du. Les choses ne se sont pas déroulées de la façon dont elles étaient censées se dérouler. Et donc vous commencez à croire que vous pouvez vous accomplir avec le temps. Mais à mesure que vous avancez en âge, vous vous rendez compte que l’accomplissement ne se produit toujours pas. Et que l’avenir se rétrécit.

Que font alors beaucoup de personnes âgées, face à ce rétrécissement de leur avenir ? Elles se tournent de plus en plus vers le passé. Au moins je peux me raccrocher à cela. Elles l'entretiennent en y pensant et en en parlant. Si leur identité fabriquée par le mental est de nature malheureuse et se fonde sur la plainte, car la vie les a tant maltraitées et a été injuste envers elles, très bien, c’est mieux que pas d’identité du tout. Et mieux vaut faire en sorte que cela continue.

Donc de nombreuse personnes sont piégées dans un sens du moi très malheureux, avec à l’esprit des plaintes continuelles au sujet de la vie, les gens autour de moi, ce qu’ils me font, Dieu si il y a un Dieu. Peut-être croient-elles en Dieu ? Ou alors ils diront « Dieu ne peut pas exister, regardez ce qu’il m’a fait ». Une fois que vous êtes piégé dans une identité, elle devient rigide et vous la maintenez en y pensant, ainsi qu’en parlant à vous-même et aux autres. Vous ne voulez pas lâcher le moi, qu’importe combien il souffre.

Donc si vous avez assez de temps, vous vous mettez en quête du plus qui comblerait le moi, une maison plus grande pour vous sentir plus en sécurité, quelque chose d’un peu plus important, une plus grosse voiture devrait faire la différence. Elle est plus grosse que celle des autres. Cette voiture devient alors une forme pensée. Ce n’est pas la voiture elle-même qui importe, car ce n’est que du métal, et dans quelques années ce sera un tas de rouille. Ce qui importe, c’est la forme pensée « voiture » qui contient le « moi ». Ce moi est la forme pensée qui s’identifie à la forme pensée « voiture ». Moi, voiture, c’est ce qui se passe. De plus s’il s’agit d’une grosse voiture, le moi, l’illusion du moi s’agrandit à travers cette forme pensée. Pour quelque temps.

Mais peu après, cela ne satisfait plus vraiment le sens du soi, et il vous faut partir en quête d’une nouvelle chose, c’est vers ce plus que vous courrez continuellement afin de parachever le moi. C’est un besoin psychologique qui lui est inhérent. Tout le monde compte sur le moment suivant, le futur, car cela donne l’impression de pouvoir obtenir ce dont on a besoin pour compléter ce « moi ». Et à ce moment là leur vient l’idée d’une maison, d’une maison plus grande que la voiture. Alors surgit à nouveau la forme pensée du moi qui devient la forme pensée de ma maison, ma, mon. Ma, c’est une histoire triste et intéressante de dire « ma » ou « mon », la mienne ». Les enfants apprennent cela très tôt. C’est une de la première chose qu’ils apprennent. Cela marque le commencement du moi, du moi égocentrique, cela est à moi.

Et donc cela constitue une idée qui se développe et la civilisation entière se focalise sur l’idée de posséder quelque chose, l’idée de propriété. Si vous examinez cela clairement, vous voyez que le fait de dire « je suis propriétaire de ceci, de cette table, de quoi d’autre que ce soit, de cette maison, de cette voiture dont on dit c’est la mienne »… Mais qu’est ce que cela veut dire ? C’est une histoire que vous êtes en train de vous raconter à ce sujet, une histoire qui devient une forme pensée. Supposons que vous soyez fou, vous compteriez peut-être cette histoire « je possède ce grand immeuble de bureaux de 20 étages ». Vous passez chaque jour devant en vous disant « c’est à moi ». Il est maintenant tout à fait possible que le reste de la société soit d’accord avec votre histoire et vous donne un morceau de papier pour reconnaître votre accord. Par contre, si vous croyez que vous possédez quelque chose, et que personne n’est d’accord avec vous, on vous prendra pour un fou. Mais si les gens sont d’accord, ils vous considéreront comme quelqu’un de riche. Cette richesse est importante car elle rend votre histoire plus imposante. Jusqu’à ce quelle redevienne triste. Ceci pour vous montrer quelle importance prennent les concepts dans votre vie. Ces concepts amènent les gens à vivre dans un sens de l’être conceptualisé, rien que des concepts mentaux.

Dès que vous vous installez dans ce moi conceptualisé, vous vivez aussi dans une réalité conceptualisée, car vous percevez toute cette réalité à travers un être fabriqué par le mental « le moi ». Et c’est ce qui donne cette compulsion à interpréter immédiatement et à cataloguer chaque expérience, chaque perception. Et ceux qui sont très habiles à cela, ceux qui savent rapidement cataloguer, analyser les choses, enregistrer l’information, la restituer, dissèquent les choses en tout petits segments, afin de les examiner, ou ceux qui s’y connaissent en concepts, on les qualifie d’intelligents. Et si vous êtes très doué pour disséquer de petits éléments de connaissance en encore de plus petits fragments, alors vous obtenez un doctorat. Si vous êtes allé à l’université, vous savez combien sont minuscules les fragments sur lesquels les gens effectuent leurs recherches.

Et c’est cela la condition humaine. Et ce besoin du plus n’est pas seulement un besoin personnel, car ce sentiment de soi devient un sentiment collectif de soi, par l’intermédiaire des entreprises, des sociétés commerciales, des nations, des tribus, des organisations. Celles-ci sont toutes créées par ce moi conceptuel dont elles sont l’expression, une expression collective de cela. C’est facile à voir quand on considère une immense société commerciale et son aptitude à croître. Regardez par exemple l’effondrement récent d’Enron Corporation aux Etats-Unis : gigantesque ! Et vous vous apercevez que la société entière était dominée par le besoin avide de « toujours plus ». Et donc c’est facile de dire « regardez comme cette entreprise est corrompue ». En fait elle n’est qu’un ego à grande échelle.

Et le soi, cette entité, ne se préoccupe donc au fil de sa vie, que de deux choses importantes : la première, c’est le mouvement du désir, celui de vouloir plus, et la deuxième un mouvement de protection, « je ne veux rien perdre du peu que j’ai déjà ». Ces deux mouvements sont « Vouloir » et « Avoir peur ». Désir, peur. Les êtres humains évoluent entre les deux. L’origine des actions entreprises par le soi égocentrique est soit le désir avec le besoin d’avoir plus, soit la peur avec le besoin de protéger le moi.

Chaque être humain est dans cet état d’esprit, son petit soi à la recherche de ce que je peux obtenir. Ou encore, cette personne représente-elle une menace pour moi ? Donc l’esprit humain regarde chaque personne qu’il rencontre avec les yeux de la peur et du désir. Et c’est comme cela que vivent les humains. Mais autre chose vient aggraver la situation aussi fabriquée par le mental. C’est d’avoir des frontières clairement délimitées et qui ne sont que pensées bien sur. Des frontières entre moi et le reste du monde y compris les autres. Et avec cela vient le besoin toujours inconscient pour ce sens du moi, de se définir plus fortement par l’opposition. Le petit soi a besoin d’ennemis quelque part, car sans eux, le sentiment d’identité ne serait plus assez solide, et deviendrait changeant

Vous pouvez voir cela sur le plan collectif en observant comment les religions, les nations, les différentes églises et les tribus, aiment toutes leurs ennemis. Elles les aiment, non pas dans le sens que Jésus leur a enseigné, mais afin de définir et de renforcer leurs sentiments d’identité. Les chrétiens ont fait cela pendant longtemps, et certains le font encore. Les musulmans le font beaucoup ces temps ci. Définir son identité à travers le fait d’avoir un ennemi, n’est pas spécifique à une religion, n’importe quelle religion s’y prête, les nations le font aussi. Qui seriez-vous sans un ennemi qui renforce tant le soi illusoire ? Et sur le plan personnel, cela signifie que vous avez besoin de problèmes. Une fois encore c’est inconscient, et cela fait parti intégrante du mental. Nous connaissons tous des gens qui sont attachés à leurs problèmes, car c’est toujours plus facile de le voir chez les autres que chez soi ! Donc l’identité de tant de gens, fondée avant tout sur une histoire, est basée sur une accumulation de problèmes et de conflits dans leur vie. Et quand vous leur demandez des nouvelles, ils vous racontent leurs problèmes. Si c’est cela la condition humaine, sur le plan personnel ou collectif, nous pouvons donc comprendre pourquoi l’histoire des êtres humains paraît si démente, folle. Lisez l’histoire du vingtième siècle, c’est un cauchemar. Et si vous regardez les nouvelles à la télévision ce soir, cela continue! Donc le monde que les êtres humains ont créé est une expression, une manifestation de leur état de conscience, ou plutôt de leur état d’inconscience.

Nous voyons maintenant pourquoi l’histoire est ce qu’elle est, et ce depuis que l’homme a commencé à la consigner. Il y a un élément de dysfonctionnement ou de folie très fort dans le psychisme humain. Et tous les grands maîtres ont vu cela, le Bouddha, Jésus, les sages de l’Inde, tous ont observé ce dysfonctionnement énorme de la condition humaine. Le Bouddha l’a appelé souffrance, en disant que la condition humaine est un état de souffrance. Jésus l’a appelé « Péché ». Bien sur ce mot a été souvent mal interprété. En Inde, ils appellent cela illusion. Tous ont observé cela et ils ont vu aussi qu’il y avait un moyen d’en sortir.

Un état de conscience différent est possible pour l’humanité. Le Bouddha l’appelle « la fin de la souffrance ». Jésus l’appelle « le salut ou le royaume des cieux ». Dans les enseignements de l’Inde, on appelle cela « libération ou illumination ». Enfin et bonne nouvelle… mais vous avez peut-être remarqué que de voir la condition humaine, telle qu’elle est déjà libérateur. Et c’est nécessaire, car s'il n’y a aucun changement dans l’état de conscience de l’homme, la planète et l’humanité ne survivront probablement pas plus de cent ans. Car se dysfonctionnement est maintenant amplifié par les moyens scientifiques et la technologie.

Pour la première fois, l’humanité se trouve confronté à la possibilité de provoquer sa propre extinction. Et c’est pourquoi aujourd’hui, un nouvel état de conscience doit émerger chez les être humains. Et c’est du fait de cette situation, qu’un nouvel état de conscience est en train d’apparaître. Maintenant que je suis en train d’ajouter une nouvelle idée à votre esprit, ce n’est pas ce que je veux faire. Certains d’entre vous me demanderont peut-être : comment savez-vous qu’un véritable changement est en train de se produire ? Comment savez-vous cela ? Cette réunion, ici même, fait partie de cette transformation de la conscience humaine.

Nous arrivons donc maintenant au coeur du sujet : la possibilité d’une transformation de la conscience, celle qui est en train de se produire ici. Pourquoi ? Comment ? Comment nous sortir de milliers d’années de conditionnements ? Et le petit soi de dire « Oh mais c’est très intéressant », « Oh oui ; je veux me transformer » Et il ajoute : « dites m’en plus, expliquez moi comment faire ? Comment puis-je y parvenir ? ». En d’autres termes, une nouvelle image prend forme mentalement, celle de moi parvenant à un état de conscience, un idéal. Donc la grosse voiture n’a pas marché, la grande maison non plus, une position plus élevée dans la société n’a pas suffit à combler le moi, trois mariages n’y sont pas parvenu, ni des expériences, ni des voyages, ni un doctorat. Mais à présent il y a la possibilité d’ajouter au moi l’accomplissement ultime. Et c’est alors que vous devenez un chercheur spirituel ! Et vous ne réalisez pas que c’est avec le même état d’esprit, le même besoin de plus et d’un avenir pour compléter le moi, qui est encore à l’oeuvre.

Et puis après vingt ans de recherches, vous commencez à être un peu fatigué. Plusieurs fois vous avez vraiment pensé avoir trouvé. La grande expérience. Qui s’est soudainement évanouie dans le passé. Et alors vous êtes devenu quelqu’un qui, un jour, a eu une grande expérience. C’est mieux que rien. Vous pouvez en parler, y penser, vous sentir malheureux à ce sujet. Quelques années plus tard c’est devenu une habitude. Alors le soi fabriqué par le mental dit « dites moi comment y arriver, quelque soit le temps qu’il faut. D’ailleurs, donnez moi du temps et j’y arriverai ». C’est ce que vous obtenez dans certain enseignement qui vous donnent satisfaction, et qui disent « il y a 12 étapes ». Cela vous permet de savoir exactement où vous en êtes « j’en suis à la quatrième étape, et toi ? » Donc certains enseignements comportent douze étapes et seul celui qui a atteint la treizième devient le chef du groupe.

Donc le soi créé par le mental vit dans le temps. C’est le passé qui lui donne son identité et c’est le futur qui détient la possibilité de son accomplissement. Tout ceci est donc lié au temps. C’est pourquoi le sentiment de soi et le temps sont si importants et expliquent l’importance du temps dans notre civilisation. Le temps est quelque chose d’étrange. Il ne cesse de s’écouler et pourtant ce qu’on entend le plus à son sujet est « je n’ai pas le temps, je n’ai pas assez de temps ». Il y a tellement de temps, il est partout le temps. Le temps est un mystère très étrange, un grand mystère. Il semble si réel. Personne ne peut le nier, puisque nous passons du temps ici. Vous passez du temps à venir ici. Et très bientôt ce sera terminé, car le temps passe et avant même de vous en rendre compte, vous rentrerez chez vous. Le temps passe ! Vous ne pouvez arrêter l’animal, il vous entraîne avec lui. C’est comme si vous étiez dans un train express qui ne s’arrête jamais et que voyez le paysage défiler ! Même notre réunion d’aujourd’hui qui pendant longtemps n’a été qu’un événement à venir qui va se rapprocher de nous : trois jours encore, puis deux, puis un jour, puis il est là, puis il passe ! Ce n’est que cela, le train express est parti dans le passé en venant du futur. Il s’est lentement approché. Plus il était loin, plus il était lent, et soudain il arrive. Et avant que vous n’ayez réalisé ce qui se passe, il a déjà disparu. Tout est si éphémère. Avant que vous ne vous ayez rendu compte de quoi que ce soit, tout s’évanouit. C’est étrange ! Il y avait un poète qui parlait du temps comme un feu qui nous consumerait tous et d’une certaine manière c’est vrai, car le feu ne laisse derrière lui que des cendres. Et c’est ce qui restera de nos corps. Consumés par le temps.

A Noël, j’ai rendu visite à de vieux amis que je n’avais pas vu depuis longtemps. Et en les voyant j’ai d’abord pensé qu’ils devaient être malades. Et puis je me suis rendu compte que non, et que c’était le temps qui les avait rendu comme cela. Quelle horreur, c’est le temps qui vous a fait cela ! Je n’ai pas dit cela mais…

Le temps est donc quelque chose de bien étrange. Il semble que nous ne puissions pas y échapper et d’un autre côté, nous n’en avons jamais assez et il nous consume. Mais il y a encore quelque chose d’étrange : le temps, en réalité est à la fois passé et futur. C’est cela le temps. Mais le plus étrange, c’est qu’en fait vous ne vous trouvez jamais en présence ni du passé ni du futur. Jamais. Donc la chose étrange est que « maintenant » est toujours la seule chose qui soit. C’est toujours maintenant.

Ainsi, bien que cela vous paraisse étrange, il ne vous ait jamais rien arrivé. Vous n’avez jamais rien fait ou vécu quoi que ce soit dans le passé. Ce qui vous est arrivé, quoi que ce puisse être, est obligatoirement dans le présent. Et comme le futur n’arrive jamais, bien sur, quand il arrive, c’est maintenant ! Ainsi, même quand on se rappelle du passé, le souvenir n’est qu’une trace de mémoire à laquelle nous prêtons attention « maintenant ». Ce dont on se souvient, la forme pensée, ne peut surgir que « maintenant ». Donc le souvenir doit donc se dérouler obligatoirement dans le maintenant. Vous ne pouvez jamais échapper à « maintenant ». Nous réalisons cette chose étrange qu’en réalité, il n’y a ni passé, ni futur, ni avenir dans votre vie. Le futur est ce qu’on envisage « maintenant ». Par conséquent, il n’y a pas de vie en dehors de « maintenant ». Donc, et cela peut paraître paradoxal. D’un côté le temps semble très puissant, il semble très réel et paraît nous affecter. Et pourtant si vous y regardez de plus près, il est introuvable. En regardant le temps, tout ce qu’on y trouve, c’est l’instant présent. Alors, quelque soit les effets du temps sur le corps, si au bout du compte le temps n’est pas réel, et peut-être que le corps ne l’est pas non plus, et que tous deux sont deux aspects de la même illusion… Mais mettons ceci de côté pour l’instant.

Et réalisons que notre vie entière se passe dans cet espace du maintenant. Elle n’a jamais été en dehors du maintenant et ne sera jamais en dehors du maintenant. Chose étrange, quand les gens sont piégés dans leur identité égocentrique fabriquée par le mental, tout ce qui compte pour eux est le passé ou l’avenir. Autrement dit, ils s’intéressent à tout sauf à ce qui est réel. Et ceci leur échappe presque continuellement. Et le moment présent est au mieux une marche qui leur permet d’atteindre le moment suivant. Et très souvent j’essaye d’échapper au moment présent, je résiste, je ne l’aime pas, je suis en route pour un autre lieu bien plus important, c’est le moment suivant. C’est là que je vais découvrir ce que je suis. Nous arrivons à une petite ouverture maintenant, une ouverture qui au début paraît très petite, et qui se situe au delà du mental conditionné. Elle mène à la libération de milliers d’années de conditionnements au travers de l’accès au pouvoir qui réside caché dans le moment présent. On pourrait dire que la transformation de conscience qui s’opère ici, est de simplement découvrir une nouvelle relation avec maintenant.

Une relation nouvelle avec maintenant. J‘ai parlé plus tôt du besoin que ressent le soi fabriqué par le mental, d’avoir des problèmes et des ennemis. Et on pourrait dire que le pire ennemi de ce soi fabriqué par le mental, est le maintenant. Les gens ne réalisent pas qu’ils ont fait du maintenant un ennemi. Mais la transformation de la conscience n’est pas quelque chose qui pourrait vous arriver à un moment donné de la vie. La transformation de la conscience consiste à simplement s’aligner sur ce moment présent. Et cela, vous ne pouvez le faire que maintenant. Est-il possible de vivre de cette manière ? De telle sorte que vous accueillez ce moment, le seul qui soit à jamais, c’est toujours ce seul moment, il n’y a jamais que lui, c’est celui là, quelque soit sa forme vous l’accueillez.

Maintenant le petit moi dit « non cet instant présent ne me plait pas du tout, je veux y échapper, il ne participe pas à mon accomplissement. En fait c’est un obstacle aux buts que je voudrais atteindre, c’est un obstacle à mon histoire». C’est cela que représente le maintenant pour le moi. Et le petit moi renchérit « ce maintenant est en train de saboter ma vie, mon histoire ». Voilà pourquoi j’ai besoin d’arriver au moment suivant. Vivre ainsi en résistance continuelle au maintenant constitue le dysfonctionnement structurel. La possibilité s’offre à nous maintenant de dire oui à ce moment, parce qu’il est, parce qu’il est constamment tel qu’il est. Et vous pourrez crier, hurler, vous plaindre, il restera tel qu’il est. Et le petit soi de dire « oui mais, je voudrais améliorer la condition du monde, je voudrais que le monde soit meilleur, ce moment est épouvantable, je ne veux pas accepter cette chose horrible ». Alors vous prenez la fuite, vous fuyez ce moment. Que se passe t-il alors ? En vérité, dans la forme que prend ce moment, et celle ci change continuellement, il y a l’espace du maintenant dans laquelle la forme apparaît, puis elle disparaît, mais en réalité elle demeure en tant qu’espace du maintenant. La forme s’étant évanouie, le mental projette le passé pour intégrer ce qui vient d’arriver, mais en réalité tout se passe dans l’espace du maintenant. Tout survient dans le maintenant, puis tout se modifie. Tout survient continuellement dans l’espace du maintenant. Il n’y a donc qu’un seul moment, qu’un seul maintenant, il ne vous quitte jamais, pas plusieurs moments, mais il y a plusieurs formes que ce moment peut prendre. Et quelque soit la forme que prend ce moment, quoi qu’il arrive, il ne s’agit pas d’un événement séparé, car il n’y a pas d’événements séparé.

Nous savons grâce aux enseignements traditionnels et à la physique moderne, que tout est interconnecté, et qu’il n’y a pas d’entité ou d’événements séparés. Et cela veut dire que ce qui apparaît dans le maintenant, ce qui se passe dans le maintenant, est une expression de la totalité, et cela signifie qu’il ne pourrait en être autrement. Le cosmos dans sa totalité a généré cela. D’où le caractère inévitable de la forme que ce moment peut prendre. Quand vous reconnaissez le caractère inéluctable de ce qui est, vous voyez alors la folie d’y résister. Car cette résistance ne fait que renforcer cette entité « moi ». Elle renforce cette illusion. C’est pourquoi le petit moi aime faire du maintenant son ennemi.

Et quand vous prenez conscience de cela, alors s’offre à vous la possibilité de vivre différemment. Et intérieurement, vous vous accordez au maintenant. Cela veut dire que vous permettez à ce moment d’être tel qu’il est. Le Bouddha a utilisé le mot « suchness », c’est à dire le fait que les choses sont telles quelles sont. Et le petit moi de dire « non, rien ne changera jamais, et vous resterez coincé dans cet insupportable maintenant pour le restant de vos jours ». Mais il ne se rend pas compte qu’il a été coincé dans ses propres schémas mentaux toute sa vie. Quand vous permettez à ce moment d’être, vous lui dites oui, oui, ce oui signifie la fin de millier d’années de conditionnements collectifs. Le non au maintenant, la réaction, le non qui réagit à ce moment, à la forme que prend ce moment, renforce la forme psychologique du moi.

Mais avec un oui, quelque soit la forme que prenne la situation, si vous lui apportez un oui, alors quelque chose d’étrange se produit. Vous pouvez dire que soudainement un espace se forme autour de ce qui arrive. Et l’espace intérieur émerge également, un sentiment de vastitude. Et ceci est l’émergence de la conscience inconditionnée. Et il y a une immense intelligence au sein de cette conscience inconditionnée. La conscience conditionnée, c’est le mental humain, qui n’est qu’un aspect partiel de cette immense intelligence « une ».

Donc quelque chose arrive, cela peut-être un défi qui survient à un moment donné de votre vie. La vie fait cela parfois. Cela se produit dans le champ du maintenant auquel vous ne résistez pas, mais à qui vous accordez simplement votre attention. Vous regardez cela. Cela apparaît et vous lui donnez simplement un flot continu d’attentions. Vous regardez. Et ceci est un changement énorme, la capacité à être simplement là, avec ce qui est dans cet état de vive attention. Et dans cet état de vive attention, une immense intelligence est à l’oeuvre. Et si l’action est nécessaire, elle se produira et elle résultera non pas d’une résistance, mais de cette intelligence qui n’est rien d’autre que cet état de présence consciente. Il arrive souvent aussi qu’un facteur extérieur surgisse soudainement, ce que requiert une situation donnée. Par exemple un événement simultané. Etant maintenant connecté à cette intelligence une, qui n’est pas limitée à votre cerveau, vous pouvez donc maintenant accueillir la vie dans cet état d’ouverture quoiqu’il arrive, même si en surface les choses paraissent mauvaises. Il ne peut en être autrement, on ne peut pas discuter avec ce qui est, donc autant l’accueillir à bras ouverts.

Mais, me direz-vous, n’y a t-il pas dans la vie des situations épouvantables, des injustices, des violences, des gens commettant des choses atroces envers les autres…. Etes-vous en train de me demander de ne rien faire ? Observez ce qui se passe. Vous êtes là en tant qu’espace de l’intelligence inconditionnée. Mettez vous dans une situation, non pas en tant que petite entité combative peureuse, en colère et qui voudrait créer un monde meilleur à partir de sa colère. Voyez par vous même qu’un monde véritablement transformé ne peut naître que d’un état de conscience transformé. C’est tout ce que nous avons besoin de réaliser, comme je l’ai déjà souligné plus tôt, la possibilité d’accueillir tout ce qui se passe maintenant dans un état de « oui ».

Et soudainement le portail s’ouvre, laissant l’intelligence inconditionnée s’exprimer à travers vous et commencer à opérer dans votre vie. Vous êtes alors vécu par la vie. Alors vous pouvez vous promener, observer les choses, les laisser être totalement, que la compulsion de les cataloguer mentalement n’est plus là. Vous n’êtes donc plus coincé par les étiquettes, les concepts, les pensées. C’est cela, s’éveiller du rêve de la pensée. Cela ne veut pas dire que la pensée ne se produit plus, mais elle n’est reconnue comme n’étant que pensée. Vous la voyez pour ce qu’elle est ? Le fait de voir, c’est la conscience inconditionnée. Ici nous ne pouvons que la désigner, au travers des mots, mais le véritable enseignement est de percevoir l’espace à partir duquel naissent les mots. Certains d’entre vous ont étudié le zen…. de quoi cela parle t-il ? De ceci, du refus sans compromis de quitter « maintenant », sauf pour des questions pratiques : nous nous rencontrerons demain à telle heure ? OK ! Retour à maintenant, maintenant.

Si on demande aux maîtres zen quel est le sens du zen, certains vous frappent, d’autres vous donnent des explications absurdes, mais … Il y avait un maître qui était devenu célèbre, car tout ce qu’il faisait, était de lever le doigt quand on lui demandait « Pouvez-vous nous expliquer le zen s’il vous plait ? » Oui (en levant le doigt… puis long silence).

Maintenant le dernier secret, le secret de maintenant, c’est de sentir ce maintenant directement, non pas en tant que ce qu’y s’y passe, mais en tant que le champ sous-jacent. Et alors vous réalisez que le « maintenant » n’est pas vraiment séparé de ce que vous êtes, parce que vous êtes ce champ de présence consciente. Différentes personnes ont utilisé différents mots pour le dire : c’est simplement « l’êtreté », la présence : je suis, mais je ne suis plus ceci ou cela. Quelque part dans la bible, Dieu se définit lui même quand on lui demande qui es-tu ? Quel est ton nom ? Dieu répond « je suis celui qui suis, je suis cela que je suis ». Je suis, c’est l’essence de l’être.

Ainsi, votre identité n’est plus cette petite histoire, mais ce champ, cet espace. Donc votre pratique spirituelle consiste simplement à dire « oui » au maintenant. Et souvent le vieux « non » refera surface, la vague de résistance à ce qui est. Alors que faites-vous ?

Vous remarquez cette vague de résistance et vous dîtes ho ! , il y a un non. Et vous faîtes cela en tant qu’espace de la présence consciente. Néanmoins, vous vous souvenez quand même de vos rôles, et de votre passé. Ensuite vous devez continuellement vous ressaisir, quand vous vous retrouvez aspiré par les concepts, le moi conceptuel, et vous vous en rendez compte puisque vous devenez malheureux, et que vous souffrez, vous avez perdu le maintenant. Où est le maintenant ? Mon passé, mon avenir… ? Et tout d’un coup votre attention fait psitt… Ho… Il n’y a pas vraiment de problème ici, n’est-ce pas ? Et puis vous vous perdez à nouveau, et un objet aspire votre attention. Donc il a un va et vient incessant, et de plus en plus vous marchez sur le fil étroit du « maintenant ». Magnifique !

Et là, nous retrouvons à nouveau le paradoxe du temps, je verrai certains d’entre vous dans ce qui ressemble à demain. Mais quand je serai avec vous ce ne sera pas demain bizarre non ? Merci.»







dimanche 22 mars 2015

Arnaud Desjardins : Ashrams - Ma Anandamayi









Réponse de Ma Anandamayi à certains disciples qui s'étonnent qu'elle reçoive autant de gens en prenant soin de leurs souffrances:

«Si vous pensez que cela m'est désagréable, c'est uniquement parce que vous faites une distinction entre votre corps et le leur. Vous ne ressentez pas comme un lourd fardeau de porter votre tête, vos mains et vos pieds, vos doigts, vos membres, parce que vous les considérez comme parties intrinsèques de votre propre corps; de même je sens que toutes ces personnes sont des membres organiques de ce corps-ci. Je n'ai aucun sens de l'ego ni de la séparation. En moi, chacun de vous a dans une égale mesure la hauteur et la profondeur de l'éternité.»

«C'est l'être le plus étonnant qu'il m'ait jamais été donné de rencontrer» (Arnaud Desjardins)





samedi 21 mars 2015

Robert Changeux : Distance, démesure, noir





r changeux

Improvisation totale, avec Michel Tardieu aux claviers, et Robert Changeux, texte et voix, sur les trois mots : distance, démesure, noir. Robert faisait partie de ces rares personnes qui ont le "verbe" spontané, ce n'est pas un savoir-faire chez lui, c'est une connexion directe entre le jaillissement instantané de la parole et l'intériorité la plus intime. Ainsi ressentait-il le monde...









lundi 16 mars 2015

Le Hit Parade de Wolinski (dernier épisode) : Les allumeurs











Cliquer sur les images pour les voir en mode plein écran.



jeudi 12 mars 2015

L'Art d'Être Conscient n°16 : Libre de l'avoir







Extraits de la page Facebook «L'Art d'Être Conscient»




«Apprendre à ne plus rien concentrer vers soi, mais à être pris dans le mouvement de l'amour divin, qui n'a ni fin ni commencement, ni but ni principe, ni limite ni contour, livré au souffle de l'Esprit, sans savoir d'où il vient ni où il va». (Un Chartreux)










«Être Conscient, c'est être en intimité avec soi-même et le partager ensemble, c'est savoir se relier dans l'instant avec ce qui nous habite en profondeur, c'est savoir écouter à partir de cette même profondeur, c'est être là, tranquille, disponible, attentif, vulnérable.»






mardi 10 mars 2015

«Into Eternity» : à propos des déchets nucléaires






Traduction du texte "Nuclear Facts" figurant sur le site du documentaire "Into Eternity", film d'où sont extraites les trois séquences video qui vont suivre.







Onkalo - Le premier site de stockage permanent de déchets nucléaires

Onkalo est un mot Finnois pour désigner un lieu caché. Il se trouve à Olkilulo en Finlande, approximativement à 300 km au Nord-Ouest D'Helsinki et représente la première tentative mondiale d'un site de stockage permanent. C'est un énorme système de tunnels souterrains creusés au sein d'un solide lit de roche. Les travaux sur le concept de l'installation ont commencé en 1970 et le dépôt devrait être remblayé et mis hors service dans en 2100 - plus d'un siècle à partir de maintenant. Aucune personne travaillant sur l'installation aujourd'hui ne vivra assez longtemps pour la voir achevée. Les autorités nucléaires finlandaises et suédoises collaborent sur le projet, et de la Suède est en train de planifier une installation similaire, mais n'a pas commencé la construction proprement dite de celle-ci.


plan


Les faits à propos des déchets nucléaires


Les déchets nucléaires de haute activité sont le résultat inévitable de la production d'énergie nucléaire. Ces déchets restent radioactifs et / ou radiotoxiques pendant au moins 100 000 ans. On estime que la quantité totale de déchets nucléaires de haute activité dans le monde d'aujourd'hui se situe entre 250 000 et 300 000 tonnes. Cette quantité augmente tous les jours.



Les normes de sécurité


Les déchets radioactifs sont dangereux pour tous les organismes vivants et l'exposition aux rayonnements peut entraîner la mort, des maladies incurables, ainsi que des mutations du code génétique. Les normes de sécurité sont basées sur des hypothèses théoriques, car l'humanité n'a pas d'expérience préalable sur laquelle s'appuyer en ce qui concerne les déchets radioactifs. En Europe, il s'agit d'une norme de sécurité de 100 000 ans pour la période minimum au cours de laquelle les déchets doivent rester isolés de tous les organismes vivants. Aux États-Unis, elle est 1 000 000 ans.


100.000 années

Il est difficile pour les êtres humains de comprendre des intervalles de temps au-delà de quelques générations, que dire alors de milliers d'années.
Pour mettre en perspective le temps, nous avons besoin d'étapes:
L'espèce humaine telle que nous la connaissons aujourd'hui est censé avoir existé pendant environ 100 000 ans. Les plus anciennes peintures rupestres connues aujourd'hui datent d'environ 30 000 ans, les pyramides ont environ 4 500 ans, la naissance du Christ date de 2010 ans, la détection des rayonnements a vu le jour il y a seulement 115 ans.

100 000 ans



Le stockage provisoire


Le combustible nucléaire usé est normalement maintenu dans des piscines d'eau dans des entrepôts provisoires. Presque tous les stockages intermédiaires sont à la surface du sol, où ils sont vulnérables aux catastrophes naturelles ou d'origine humaine, et une surveillance intensive (gestion de la sécurité, entretien) est nécessaire. L'eau dans les piscines refroidit les barres de combustible, car la chaleur émanant d'eux peut par ailleurs entraîner un incendie radioactif, et en même temps, l'eau crée un bouclier pour la radioactivité. Il faut 40 à 60 ans pour refroidir les barres de combustible à une température inférieure à 100 degrés Celsius. C'est seulement en dessous de cette température que le combustible usé peut être transporté ou traité ultérieurement. La plupart des stockages intermédiaires sont situés à proximité des centrales nucléaires, car le transport des déchets est complexe, et sous réserve de conditions de sécurité trés strictes.


Stockage permanent


Afin d'assurer que les déchets soient maintenus isolés des tous les organismes vivants et ne puissent se répandre dans la nature, des entrepôts permanents sont nécessaires, car nous ne pouvons pas assurer une surveillance continue, la gestion de la sécurité, ou l'entretien des sites de stockage provisoire pour la durée de la période standard de sécurité de 100 000 ans (UE) à 1 000 000 d'années (US).

Le stockage définitif des déchets doit être situé dans des environnements très stables. Les zones où l'activité volcanique ou sismique est fréquente sont exclues, tout comme les plaines qui peuvent faire l'objet d'inondation ou de montée des eaux marines, ainsi que les substratum rocheux poreux ou érodés, où des infiltrations d'eau du sol peuvent se produire. Les pays producteurs d'énergie nucléaire dépourvus de sites appropriés pour le stockage permanent peuvent avoir à exporter leurs déchets vers d'autres pays. La sécurité des transports est cruciale, mais c'est une question non résolue.




Retraitement


Le combustible nucléaire usé peut être retraité pour une fraction seulement de l'énergie contenue dans les barres de combustible en usage, avant qu'elles ne soient déplacées des réacteurs à site de stockage provisoire. Le plutonium est un sous-produit de retraitement. Le plutonium est un élément essentiel dans les bombes nucléaires. Le fait que le retraitement n'est pas réalisée aujourd'hui est une décision politique, conséquence de l'acte de non-prolifération. Si le retraitement est pratiquée plus tard, le combustible nucléaire usagé restera en stockage provisoire. La quantité de déchets nucléaires de haute activité peut être réduite grâce au retraitement, mais pas en totalité.



Transmutation


La recherche est effectuée sur la possibilité de la transmutation, qui est un processus qui peut réduire la toxicité des déchets et le temps pendant lequel ils restent dangereux. Jusqu'à présent, la transmutation est une option théorique seulement, que les scientifiques ont conçu, mais pas encore pu tester dans la réalité. Si la transmutation devient une réalité, la production de déchets nucléaires de haute activité pourra être réduite, mais elle ne sera pas totalement évitée.


Communication

La plupart des langues anciennes ont été oubliés au fil du temps, et ont dû être redécouvertes pour être comprises par nous au temps présent. Certaines langues restent encore à décoder. Il s'agit d'une question ouverte : si, et comment pouvons-nous communiquer avec un avenir inconnu et très éloigné au sujet des questions complexes comme les déchets nucléaires et la radioactivité. Des études scientifiques ont été menées en rapport avec le stockage de déchets nucléaires, mais ces études ont pris fin parce que l'Académie américaine des sciences a jugé impossible de sécuriser les communications avec une certitude scientifique sur une période de 100 000 ans.



PS : Ce qu'en disait Arnaud Desjardins en 1997.

(..)Disons que mon activité et les livres que j'ai publiés ont trouvé un écho chez des personnes exerçant toutes sortes de fonctions, parfois importantes, dans les domaines les plus divers. Ces personnes qui m'ont parlé à coeur ouvert, comme elles se seraient livrées à un prêtre ou un psycho­thérapeute en qui elles auraient eu confiance, incluent de hauts fonctionnaires, un membre d'un cabinet ministériel, un ingé­nieur du nucléaire, en passant par quelques universitaires et chercheurs scientifiques. Ces échanges m'ont ouvert de larges horizons sur le monde actuel. Par exemple en ce qui concerne la gravité réelle du problème des déchets radioactifs : pas plus qu'on n'a dit en Ukraine la vérité à propos de Tchernobyl, on ne nous dit à nous, Français, la vérité de ce qui se passe en France. Une personne s'était vu proposer un travail très bien payé de guide chargé de faire visiter une centrale nucléaire. Si on lui posait des questions sur les déchets nucléaires, elle avait comme instruction de répondre avec le plus grand sérieux qu'il n'y avait aucun problème, que la situation était entièrement contrôlée, que si cela avait effectivement fait lever quelques craintes à une époque, c'était à présent du passé... Bref, elle était « briefée » pour mentir délibérément. Or, tout le monde sait plus ou moins ce qui m'a été formellement confirmé par un spécialiste tra­vaillant depuis longtemps au C.E.A. : il y a là un problème très grave et qui n'est pas maîtrisé. Nous nous éclairons aujourd'hui et la facture sera présentée à nos enfants.
("Regard sages sur un monde fou", p 168)




film



lundi 9 mars 2015

Le Hit Parade de Wolinski : le monde à l'envers...











Cliquer sur les images pour les voir en mode plein écran.




dimanche 8 mars 2015

Jeff Beck live (feat. Imogen Heap)






Jeff Beck, live at Ronnie Scott's Jazz Club (27 novembre 2007)


Guitar : Jeff Beck
Bass : Tal Wilkenfeld
Drums : Vinnie Colaiuta
Keyboards : Jason Rebello
Guest Artist : Imogen Heap (chant)





vendredi 6 mars 2015

Nous qui savons tant de choses...





Mosaïque



Nous qui savons tant de choses
Nous ne pouvons que regarder
Ce peuple muet et grandiose
Qui chante la vie en secret.

Et la terre soupire
En nous voyant passer.
Lise



jeudi 5 mars 2015

Arnaud Desjardins : les trois tiroirs




René Magritte, «Le Chef d'œuvre ou les mystères de l'horizon»

Extrait du livre «La traversée vers l'autre rive», voici un texte qui attire notre attention sur le risque de confusion qu'il y a entre la simple compréhension intellectuelle et l'expérience directe de ce que pointent certaines formules de Swami Prajnanpad. Un exemple classique de ce genre de confusion est le suivant : croire que l'on connait le goût de la mangue sans en avoir jamais mangé juste parce qu'on en a lu maintes descriptions. Arnaud Desjardins nous guide pas à pas dans l'expérimentation concrète de ce que proposent certaines formules compte tenu du niveau où nous sommes ici et maintenant.




Il n'y a pas de notice dans la boîte d'une spécialité pharmaceutique qui ne mentionne : « Comme tout produit actif, ce médicament peut entraîner des conséquences non souhaitées ». Il n'y a pas d'action sans réaction et de convexe sans concave. Il s'agit donc d'utiliser les enseignements de Swâmiji sans se trom­per sur le mode d'emploi.

Vous connaissez, ou vous découvrez peu à peu, ce qu'a pu dire au cours d'entretiens ou écrire dans ses let­tres en hindi, bengali ou anglais, Swâmi Prajnânpad. Beaucoup de ses paroles, de ses affirmations originales, transmettent des vérités que nous ressentons d'abord comme des idées puissantes et transformatrices. Mais le malentendu ou l'incompréhension sont toujours possibles et ces vérités libératrices deviennent alors perturbatrices. Ce qui nous est proposé va souvent à l'encontre de ce dont nous sommes convaincus au départ du chemin et parle de ce que nous ne connais­sons pas encore. Pratiquement tout ce qui fait notre expérience dans les domaines des pensées, des émo­tions et des actions va être remis en cause. Il y a donc des risques de confusions quant à la méthode et toutes sortes d'interprétations erronées sont possibles. Par exemple, est-ce tout de suite évident et limpide de lire Swâmiji résumant : « Toute la voie tient en ces deux termes : You and your mind, vous et votre mental » (indiquant par là une dualité) et insistant par ailleurs sur : « Vous annihilez la distinction (ou la division) entre vous et votre émotion. Vous êtes peur, vous êtes angoisse. Be advaïta here and now, soyez non-deux ici et maintenant » ? Et pourtant, tout ceci peut se révéler simple, non contradictoire et pleinement con­vaincant mais c'est seulement votre réalisation per­sonnelle qui vous le prouvera. Saisissez donc toutes les occasions de vérifier si votre compréhension de la pratique est complète — notamment quant à la gestion des émotions et des pensées et l'ordre dans lequel il faut procéder à cet égard car certaines des affirmations transmises à Hauteville vont tellement à l'encontre de ce que vous croyez qu'une réflexion personnelle sur leur contenu est nécessaire. La pratique est plus une question d'habileté que de force.



La démarche que nous proposons à Hauteville est une voie parmi d'autres. Elle doit l'essentiel à Swâmi Prajnânpad qui possédait une grande érudition et une remarquable capacité à rendre peu à peu clair ce qui ne l'est certes pas au premier abord. C'est une qualité fort utile car une grande part de ce genre d'enseignements se réfère à des niveaux de conscience dont vous n'avez pas encore l'expérience concrète, comme si on parlait à une fillette de dix ans, même très intelligente, de la vie sexuelle d'une femme totalement épanouie dans ce domaine. Ce que nous vous transmettons prend ap­pui sur des paroles que nous avons appelées en fran­çais : « Les formules de Swâmi Prajnânpad », parce que Swâmiji lui-même disait souvent : « Now Swâmiji will give you the formula. » Ces paroles, comme tou­tes les paroles de sages, sont présentées comme des affirmations aussi indiscutables que celles d'un profes­seur de géographie enseignant : « La Volga se trouve en Russie et le Mississippi aux États-Unis ». Vous ne trouverez aucune modestie dans ces paroles, jamais d'expressions telles que « je crois », « je pense ». En revanche, il est fondamental de vérifier par soi-même et pour soi-même ce qui vous est dit. Vous avez tous les droits d'examiner ce qui vous est affirmé et vous saurez à votre tour si ces paroles transmettent ou non la vérité. Dans ce type de démarche, la croyance n'entre pas en ligne de compte. Nous sommes trop imprégnés d'imprécision et, dès qu'il s'agit de philosophie ou de spiritualité, nous demeurons dans un certain flou : « Je crois, je pense, le Bouddha a dit que..., Arnaud aurait dit que... ». Seule une démarche méthodique peut vous permettre de sortir du monde des opinions et des croyances et vous mener vers une véritable transformation : « J'écoute avec intérêt la parole qui m'est dite ou que je lis, j'y réfléchis, je m'étudie moi- même pour voir si elle correspond tant soit peu à mon expérience et si je peux la reprendre à mon compte en vue d'une mise en pratique concrète ».
Ainsi vous ne mettrez pas en pratique « ce que Swâmiji a dit ou écrit » mais ce que vous aurez véri­fié par vous-mêmes. Il y a donc d'abord non pas une croyance mais une confiance : « Je vais réfléchir à ce qu'affirme Swâmi Prajnânpad et vérifier si j'arrive aux mêmes conclusions que lui », de même qu'un scientifique vérifierait dans son laboratoire les con­clusions auxquelles un autre scientifique serait arrivé dans un autre laboratoire. Prenez garde à ce que l'en­seignement de Swâmiji ne devienne pas un ensemble d'idées, donc une idéologie que vous adoptez parce que cela fait partie d'une démarche à laquelle, glo­balement, vous adhérez. Allez de petite certitude en petite certitude. Souvenez-vous d'une formule telle que : « Personne ne vit dans le monde, chacun vit dans son monde », ou de ce que m'a affirmé Swâmiji, lors de notre première rencontre : « Vous n'avez ja­mais vu Mâ Anandamâyi, vous n'avez vu que votre Mâ Anandamâyi ». Il se peut que des paroles de ce genre vous semblent très intéressantes mais qu'elles n'aient aucune répercussion concrète dans votre existence. Pouvez-vous vérifier — donc être certain — que vous n'avez jamais vu votre mari, vos enfants, votre patron qu'à travers votre mental, votre ego et vos projections ? Si vous pouvez le constater et le reconnaître vraiment, vous aurez une expérience de première main et vous échapperez au monde des pensées et des opinions. C'est le point départ d'une réelle transformation.



Durant les derniers mois de son existence, Swâmiji, qui avait toujours pris ses repas en silence, laissait parfois tomber une petite phrase qui avait plus de prix qu'un entretien entier. Vous vous souvenez — je l'ai souvent raconté — qu'un matin, lors du dernier sé­jour que j'ai effectué auprès de lui, il mangeait à la pe­tite cuillère une sorte de fromage blanc qu'au Bengale on appelle chana. Il me demande : « What is Swâmiji doing ? Qu'est-ce que Swâmiji est en train de faire ? » Je lui réponds : « Swâmiji mange du chana avec une petite cuillère en métal ». Et Swâmiji laisse tomber : « Swâmiji is eating Swâmiji with the help of Swâmiji. Who is Swâmiji ? Swâmiji mange Swâmiji avec l'aide de Swâmiji. Qui est Swâmiji ? ». Ce genre de paroles, au premier abord incompréhensibles, concerne un niveau de conscience que nous n'avons pas encore at­teint et que l'on pourrait, comme le Bouddha, appeler « l'autre rive ».

Les lettres de Swâmiji peuvent vous être d'une grande aide mais une parole de ce type (comme d'ailleurs bien des paroles de sages) peut vous égarer si vous ne la situez pas dans une vue d'ensemble. Si vous avez une tournure d'esprit de philosophe ou de méta­physicien vous risquez d'en avoir une compréhension purement intellectuelle et vous bercer de l'illusion que ce que vous avez compris avec votre tête vous tient lieu d'expérience. Prenons en exemple une autre formule de Swâmiji, qui pourrait aussi bien sortir de la bouche d'un maître tibétain : « There is no seer and no seen, there is only seeing, Il n'y a pas celui qui voit, il n'y a pas ce qui est vu, il y a seulement vision ». Pouvez-vous, aujourd'hui, tels que vous êtes, avec vos désirs, vos peurs et vos projections, affirmer que vous avez l'expérience de cette affirmation ? La réponse est non. Voilà pourquoi il est important de reconnaître à quelle étape de votre progression sur le chemin se situent les paroles que vous êtes amenés à entendre ou à lire — et à mettre en œuvre.



Pour désigner la voie, le Bouddha a employé l'ex­pression « la traversée vers l'autre rive », ce qui sug­gère qu'il y a, d'un côté, la rive de la souffrance et, de l'autre, la rive de l'au-delà de la souffrance. Entre les deux : la traversée. Pour cette traversée, une barque est indispensable et elle n'est plus du tout nécessaire quand nous avons achevé notre parcours. Certaines formules de Swâmiji concernent la rive sur laquelle nous sommes et nous aident à la voir avec lucidité. D'autres paroles concernent la traversée et d'autres enfin, comme celles que je viens de citer, évoquent l'autre rive dont nous n'avons pas encore l'expérience et que l'on ne peut appréhender à partir du mental. C'est dans ce contexte que j'ai proposé trois tiroirs dans lesquels nous pourrions classer les différentes pa­roles de Swâmiji. Un tiroir se nomme « cette rive » et se situe au niveau où vous êtes maintenant, le second tiroir pourrait s'intituler « la traversée » et le troi­sième « l'autre rive », où se trouvent rangées soit des paroles vraiment étranges, soit des paroles apparem­ment incompréhensibles qui ne vous concernent pas aujourd'hui. Plus vous saurez reconnaître à quel tiroir correspond telle ou telle formule, mieux vous serez à même d'utiliser celle-ci de façon adéquate pour votre transformation.

Certaines paroles qui ont une grande valeur pen­dant la traversée n'en ont plus, au contraire, quand nous avons atteint la rive de l'éveil. Ainsi, une affir­mation telle que : « Il n'y a rien à faire, tout est déjà là, je suis déjà la grande Réalité Ultime » est à classer dans le troisième tiroir. Mais dans le tiroir du milieu qui concerne la traversée, il n'est question que des efforts que le disciple doit accomplir. Dans le tiroir trois, nous rangeons : « Le sage, établi dans la paix et l'amour, n'a plus d'émotions » mais, dans le tiroir un, nous pouvons avoir l'audace de placer cette formule : « L'être humain n'est qu'émotions ». C'est pourquoi, si vous vous trouvez sur cette rive et que vous pre­nez pour vous aujourd'hui certaines paroles de sages authentiques concernant l'autre rive, vous risquez de tomber dans une impasse.



Je vous parle à partir de ma propre expérience. J'ai commencé une recherche à l'âge de vingt-quatre ans et, en même temps que je faisais des découvertes pré­cieuses, je me débattais douloureusement dans les ap­parentes contradictions que présentent les enseigne­ments spirituels. Et, depuis plus de trente ans, je vois tant de personnes sincères qui veulent atteindre elles aussi le Royaume intérieur et qui se débattent dans des confusions, des imprécisions et des malentendus, malgré leur bonne volonté et leur sérieux. Voilà pour­quoi il est si important de discriminer, entre les diffé­rentes paroles reçues, à quel niveau de notre parcours elles s'adressent.

Visiblement une formule comme : « Personne ne vit dans le monde, chacun vit dans son monde » con­cerne cette rive-ci, le tiroir numéro un. Je peux y ré­fléchir et vérifier si cette affirmation est fondée. Je ne peux pas me contenter de croire sur parole quelqu'un qui m'inspire confiance. Il me faut confirmer par moi- même s'il est vrai qu'à chaque instant j'interprète la réalité de manière égocentrique. Je commence donc par des observations simples qui vont s'approfondir peu à peu, mais qui sont certaines. Par exemple, face à un bouquet de fleurs, l'un va dire : « J'aime beaucoup ce bouquet, je le trouve très beau » et l'autre rétorque­ra : « Ce bouquet est quelconque, moi je n'aime que les bouquets japonais composés de trois fleurs piquées dans un pique-fleurs ». Qu'est-ce qui fait que face au même bouquet deux personnes ont une appréciation différente, voire diamétralement opposée ? Chacun voit le bouquet à partir de son monde, c'est-à-dire de son inconscient, de son vécu, de son éducation, de son milieu socioculturel. Notre monde, c'est le réservoir d'impressions accumulées au cours d'une existence qui alimente nos projections. Si nous vivions tous dans le même monde nous verrions tous le même bouquet. Moi, je vois un magnifique bouquet et l'autre voit un bouquet très quelconque. Ce genre de constatation vous ouvre un champ de réflexion et d'observation im­mense qui vous permettra peu à peu de prendre une distance par rapport à votre propre monde subjectif. Mais dans un premier temps, vous pouvez faire cette observation toute simple. C'est un premier pas. Cet exemple est intéressant parce que les fleurs touchent éminemment notre inconscient. Donc c'est particu­lièrement vrai tout de suite pour des fleurs : personne ne voit le bouquet, chacun voit son bouquet.

Et peut-être que, dans la même journée, une infor­mation vous paraît fâcheuse et vous déclarez : « C'est grave », tandis que pour votre associé : « Mais c'est bénin, il n'y a pas de quoi s'inquiéter ». Que vient fai­re ici le mot « voir » ? Que signifie-t-il dans cet exem­ple ? Je vois les choses d'une certaine manière, l'autre voit la même chose d'une autre manière et il est bien probable qu'aucun de nous ne voit vraiment, que tous deux nous interprétons. Personne ne voit la situation, chacun pense sa situation en fonction de sa program­mation personnelle. Nous pouvons être bouleversés en lisant les textes des plus grands mystiques mais des petits échantillons de ce genre donnent un contenu d'expérience à une parole que nous avons entendue. C'est de cette manière que l'on peut progresser.


Par contre, vous pouvez tenter dès maintenant une expérience à partir d'une formule de Swâmiji issue du troisième tiroir : « Non pas : je regarde le bouquet, mais : le bouquet est regardé ». Qu'est-ce que cela veut dire ? Si je regarde le bouquet, je me projette sur le bouquet, je vois mon bouquet. Dans l'autre cas (« le bouquet est regardé ») je me situe devant le bouquet, je me tais intérieurement, je ne fais aucun commentaire sur ce bouquet, même pas en moi-même, je ne m'occupe pas de savoir si je le trouve beau, merveilleux ou complètement raté. Je tente de m'effacer en faveur de la vision du bouquet. Et le bou­quet ne proclame pas : « Je suis beau, je suis laid, je suis joyeux, je suis triste ». Il affirme : « Je suis ce que je suis ». Vous pouvez sentir, au moins par moments, la radicale différence. Moi, avec tout mon bagage inconscient, mes souvenirs, mes peurs, mes espoirs, mes revanches à prendre sur le passé, ce moi-là, pour un instant, fait silence, je dirai même : a disparu. Une parole comme celle-ci ne désigne pas seulement l'état ultime auquel vous n'avez pas accès pour le moment, elle évoque quelque chose que vous pouvez tenter, à quoi vous pouvez vous exercer. Je fais silence, je suis complètement accueil du bouquet tel qu'il est, et, par moments au moins, j'entrevois ce que serait ma vie si cet état était permanent. Ce genre d'expérience peut être utile pendant la traversée à condition d'être bien conscient que c'est un exercice qui a pour seul but de nous donner un avant goût de l'état sans ego. Il ne peut constituer à lui seul une pratique à part entière.

Swâmiji m'avait fait remarquer que les déclara­tions émanant du niveau un étaient semblables mais inversées par rapport à celles du niveau trois, comme un négatif et un positif avant le numérique : c'est la même image mais les noirs sont blancs et les blancs sont noirs. « Satan est le singe de Dieu » disent les soufis. Par exemple, si l'Océan en nous peut procla­mer : « Tout est moi, il n'y a que moi » (l'ultime non-dualité), l'impérialisme de l'ego voudrait que le monde entier soit son prolongement et, si les circons­tances ne répondent pas à son attente, cela implique pour lui que les choses ne se passent pas comme elles le devraient. L'ego tente vainement une fausse non-dualité en refusant la différence. Il essaye lui aussi, tragiquement, d'affirmer « moi seulement ». Autre inversion, Swâmiji résumait la condition de départ (premier tiroir) par ces mots : « It is the status of a slave, c'est la condition d'un esclave », tout en évo­quant la Libération par « Complete slavery is perfect freedom, l'esclavage complet est la liberté parfaite » — autrement dit, en termes religieux, la totale soumission à la volonté de Dieu. Vous voyez combien chaque mot, chaque phrase de Swâmiji demandent à être éclairés par des commentaires, par des exemples, parfois par d'autres termes plus évidents et plus con­vaincants pour vous mais qui désignent exactement la même réalité, la même vérité.



Ouvrons donc à nouveau le premier tiroir et examinons une formule de Swâmiji qui exprime une vérité précieuse : « Vous êtes des marionnettes dont l'existence tire les fils ». Ces paroles nous rappellent la célèbre affirmation de Gurdjieff qui va exactement dans le même sens et que nous pourrions ranger dans le même tiroir : « L'homme est une machine ». Swâ­mijî insistait beaucoup sur le fait que nous sommes totalement conditionnés par notre hérédité, par les impressions fortes de la toute petite enfance et par les influences de notre éducation et de notre culture. L'existence presse un bouton et déclenche en nous une réaction, presse un autre bouton qui déclenche une autre réaction. Une bonne nouvelle fait lever une émotion heureuse qui n'en reste pas moins une réac­tion mécanique. Et à partir de cette réaction intérieu­re, qui déforme notre perception de la réalité, nous réagissons extérieurement. Les actions à ce niveau-là sont complètement compulsives. Suis-je un homme, une femme, établi(e) en moi-même ou une machine à réagir ? Où est la liberté là-dedans ? Mes actions soi-disant conscientes ne seraient donc que des réactions qui s'imposent à moi ? Je veux cerner, comprendre, approfondir. Donc avant même d'essayer d'agir plus consciemment, je vais vérifier si ces affirmations sont véridiques. Je vais m'observer face à l'action et voir s'il est vrai que je me laisse emporter par des événements heureux et déprimer lorsque les situations me sont défavorables et que je réagis ensuite aussi mécanique­ment à ces réactions émotionnelles et mentales, aux états d'âme, aux humeurs que les événements déclen­chent en moi à mon insu.
Sur le même thème, nous trouvons dans le deuxiè­me tiroir plusieurs formules intéressantes : « Don't mistake reaction for action, Ne prenez pas une réac­tion pour une action » — autrement dit : ne prenez pas une réaction impulsive et compulsive pour une action libre et objective. Vous pouvez honnêtement reconnaître pour vous-même si ce que vous venez de faire ou de dire était une pure réaction. Dans le même tiroir nous trouvons : « To do, there must be a doer, Pour agir, il faut un agissant ». Ou : « First the doer, then the deeds, D'abord l'agissant, ensuite les actions », « Before any action, check the actor, Avant toute action, vérifiez l'acteur ». Directives qui n'ont plus cours au niveau du troisième tiroir.

Ces formules nous disent que, tant que nous sommés menés par nos émotions, nous ne pouvons espérer accomplir une action digne de ce nom. Face à une difficulté, la plupart d'entre nous s'intéresse avant tout à l'action — quelle décision dois-je prendre ? Quel choix dois-je faire ? — mais ces formules nous invitent à nous occuper avant tout de l'agissant, c'est à dire de nous-mêmes, tels que nous sommes aujourd'hui avec nos mobiles inconscients et avec les émotions qui nous animent. Pendant la traversée, nous ne pouvons prétendre poser des actes libres, en revanche nous pouvons nous étudier et tenter d'y voir clair dans le faisceau de désirs, de craintes et d'impulsions contra­dictoires qui nous meuvent. Nous pouvons prendre conscience de l'aspect mécanique de nos décisions et de nos actions, autrement dit étudier la relation di­recte entre le pseudo-agissant, qui porte en lui tout un monde de conflits et d'émotions, et ses actes. Nous pouvons ensuite nous demander ce qui pourrait nous permettre d'accomplir des actes beaucoup plus conscients et libres et rechercher quelles formules de Swâmiji pourraient éclairer ce point.




Nous pouvons ensuite nous intéresser aux paro­les concernant les actions du sage qui n'est plus mû par son égocentrisme : un troisième type d'action que Swâmiji appelait « la réponse à la demande de la situa­tion » et que l'ensemble de la tradition hindoue ap­pelle la spontanéité ou l'action spontanée. Cela ne veut pas dire une action impulsive, mais l'action au-delà de l'ego, une action dans laquelle l'agissant individuel a disparu. Ce genre de paroles, je les place dans le troi­sième tiroir. Swâmiji, comme beaucoup de sages hin­dous, parlait de lui à la troisième personne. Il me dit un jour : « Swâmiji does not act, an action takes place, Swâmiji n'agit pas, une action a lieu » et vous lirez certains enseignements de maîtres hindous célèbres aujourd'hui qui ne parlent qu'au niveau du troisième tiroir, en insistant sur l'effacement de l'agissant indi­viduel dans la non-dualité. Si l'acteur est conscient et libre, l'action juste s'impose à lui. Oui, mais où est-ce que vous en êtes, vous ? Qu'est donc cette action que Swâmiji appelait « la réponse qui s'impose », qui ne comporte ni doute, ni hésitation et qui est en même temps l'action la plus juste, la plus harmonieuse dans le relatif ?
Tenez bien compte, même si aujourd'hui vous ne voyez pas encore complètement quelle peut en être l'utilité, de cette idée des trois niveaux de répon­ses. Sinon nous arrivons à des incompréhensions et vous vous demandez aujourd'hui ce qui ne vous sera possible que demain. Qu'est-ce que chacun, chacune peut commencer à entrevoir ? Je suis sûr que, si vous gardez ces idées en tête pour lire les traductions de lettres de Swâmiji à ses disciples, vous allez sentir : ce passage parle du niveau actuel, celui-ci parle du pro­cessus de transformation et celui-là laisse entrevoir ce qu'est la transformation une fois accomplie. Il faut donc toujours en revenir à cette vérité : parmi les idées auxquelles j'adhère, quelles sont celles qui pour moi sont seulement des idées, donc une idéologie parmi d'autres et quelles sont celles qui relèvent de l'indu­bitable expérience personnelle ? C'est un aspect de la voie montrée par Swâmi Prajnânpad, qui, imprégné de la culture hindoue, avait en même temps l'exigence d'un scientifique.